Chef Jinhee Lee
Nous nous sommes arrêtés au JinBar pour en savoir plus sur le parcours qui l'a conduit à créer le restaurant le plus populaire des Calgariens à la recherche de plats coréens réconfortants.
Lire la biographieNé en Saskatchewan, le chef Dale MacKay a commencé sa carrière culinaire en tant que friteur à Vancouver, ce qui a contribué à révéler sa passion profonde pour la nourriture. Cette passion l’a mené à Londres, en Angleterre, où il a développé son expérience au Claridge’s, un restaurant de Gordon Ramsay.
Après un passage dans des établissements du chef Ramsay au Japon et à New York, il est retourné chez lui pour devenir chef de cuisine au Lumière, à Vancouver. Ouvrant deux restaurants dans cette ville, il a même trouvé le temps de gagner le premier concours Top Chef Canada.
En 2012, il a décidé de fermer ses deux établissements à Vancouver, pour retourner, un an après, dans sa ville natale de Saskatoon et y ouvrir le premier de quatre restaurants qui allaient plus tard former le Grassroots Restaurant Group.
Le chef MacKay explique les origines de chaque restaurant, leur fonctionnement au sein du groupe et comment la communauté s’est serré les coudes lorsque Saskatoon en avait le plus besoin.
Avec Grassroots Restaurant Group, vous avez fondé certains des meilleurs restaurants de la Saskatchewan, qui ont tous leur propre concept. Quelle était votre démarche pour développer chacun d’eux?
Nous n’aimons pas répéter les mêmes choses, surtout dans une petite ville. Le premier des quatre était Ayden Kitchen + Bar, nommé en l’honneur de mon fils qui avait douze ans lors de l’ouverture. Ayden est un assemblage de tout ce que j’ai appris pendant ma carrière. L’idée était d’offrir une cuisine du monde, avec des saveurs de l’Inde et de la Thaïlande préparées avec des techniques françaises. Pour moi, c’est l’endroit le plus amusant pour créer des repas sans frontières. Ça peut sembler chaotique, mais tous les mets du menu fonctionnent ensemble, car ils proviennent des mêmes chefs.
Le nom de notre deuxième restaurant, Little Grouse on the Prairie, s’inspire du titre d’une émission de télévision et de l’oiseau officiel de notre province. Nous voulions créer quelque chose qui rappellerait les cuisines de nos grand-mères. On mange ensemble comme une famille et on regarde les chefs travailler. Little Grouse n’est pas qu’une cuisine ouverte, elle est complètement exposée. Peu importe où on se trouve, on est toujours qu’à quelques mètres. Les pâtes sont faites à la main à chaque commande, ce qui contribue beaucoup au goût. J’adore Little Grouse, c’est probablement l’un de mes restaurants préférés pour les soupers décontractés.
Notre troisième restaurant s’appelle Sticks and Stones. Mon partenaire d’affaire et meilleur ami, Christopher Cho, est Coréen, mais il est né au Brésil et a grandi en Ontario. J’ai vécu au Japon pendant trois ans et j’en ai appris beaucoup sur la nourriture japonaise. La cuisine asiatique est devenue une passion. J’ai également passé trois mois en Corée, où j’ai appris des techniques traditionnelles et plus récentes auprès d’un grand chef coréen. À notre ouverture, la mère de Cho est venue faire du kimchi avec nous pendant deux semaines, pour nous montrer la véritable méthode traditionnelle. Sticks and Stones est probablement le préféré de la ville, car nous y préparons du ramen et des sushis. J’y mange trois fois par semaine, car c’est délicieux, et trouver du bon sushi en Saskatchewan n’est pas facile.
Notre quatrième restaurant, Avenue, se trouve à Regina. Nous avons d’abord trouvé cet espace. Il était parfait, alors j’ai approché le propriétaire pour lui demander comment il serait possible de s’y installer. C’était le début d’un partenariat exceptionnel. Trois de nos quatre restaurants se trouvent dans des bâtiments patrimoniaux qui ont plus de cent ans. Avenue possède de superbes plafonds de 9 mètres et des fenêtres de 5,5 mètres aux arches en fer forgé. Le restaurant est arrivé premier en Amérique du Nord et troisième au monde au concours Hospitality Design of the Year. Nous adorons Avenue. C’est semblable à Ayden, car nous n’avons pas trop de règles en ce qui concerne la culture, mais l’inspiration française est bien présente. Nous préparons des recettes plus traditionnelles comme le Wellington, le tartare de bœuf, les poulets entiers rôtis et le poulet pour deux. Nous ajoutons également de belles petites touches comme les croquettes aloo gobi et les côtes levées de porc yuzu.
Quel est votre rôle au jour le jour en tant que fondateur du Grassroots Restaurant Group. Comment change-t-il d’un restaurant à l’autre?
J’essaie de passer dans chaque restaurant chaque jour et de parler aux chefs ainsi qu’aux gérants. Je passe du temps à l’ordinateur pour lire les courriels, m’occuper des promotions et faire le plus de marketing possible à l’interne. Je suis aussi souvent sur la route, car je travaille à Regina deux ou trois jours par semaine.
Avant la COVID, je me rendais au moins une fois par mois à différents événements. Je passais deux mois par année à Toronto pour le tournage d’émissions du Food Network, quand j’étais chanceux. C’était génial pour la Saskatchewan, car nous voulons briller à l’échelle nationale. Ces sorties ont aidé à mettre la province et Saskatoon sur la carte comme destinations culinaires.
Le plus grand défi demeure la communication entre les restaurants. Il s’agit d’un groupe de restaurants, donc nous voulons qu’ils jouent tous un rôle. Il n’y a pas de favori, et les chefs ont de bonnes connexions entre eux. Si quelqu’un trouve une bonne offre pour du bœuf, du poisson ou un nouveau produit, je transmets l’information à tous les restaurants, tout en préservant leur identité individuelle.
Comment collaborez-vous avec vos chefs de cuisine pour créer les menus?
Je dirais que les menus qui changent le plus sont ceux d’Ayden et d’Avenue. Nous changeons leurs menus chaque saison en fonction de ce que nous recevons. Je fais aussi beaucoup attention aux chiffres et aux coûts. La seule façon de nous assurer d’être encore là dans dix ans est de fonctionner efficacement.
Lorsqu’un chef veut choisir un plat, il m’appelle et dit : « Je travaille sur quelques plats, peux-tu venir? » Ben et moi goûtons les plats et nous en discutions. S’il y a quelque chose que je n’aime pas, nous essayons autre chose, ou j’essaie d’améliorer la recette. Souvent, quelques petits changements suffisent, que ce soit pour l’acidité, le choix des produits ou éviter les répétitions.
Je m’attends à ce que les chefs de cuisine apportent des idées et des saveurs nouvelles pour qu’on en discute. Les chefs sont des artistes qui ont besoin de temps pour évoluer. Ils ne partent pas seuls de leur côté. C’est un travail collectif. Nous respectons tous nos opinions, car nous restons connectés et discutons régulièrement.
Quels sont les plus points les plus gratifiants et difficiles de la gestion de votre groupe de restaurant?
Nos invités sont à l’avant-plan, car nous faisons tout pour eux. Quand quelqu’un me voit dans la rue et me dit « j’étais à votre restaurant hier et c’était incroyable », ça me fait sentir vraiment bien par rapport à mon travail.
Ensuite, il y a l’équipe. J’adore nos interactions quotidiennes : discuter avec eux et tenter de les inspirer. Comme la bonne humeur est toujours importante, il faut les garder motivés et s’assurer qu’ils progressent dans la vie. C’est une forme de mentorat, ça va plus loin que la nourriture. Comment va leur vie personnelle? Gagnent-ils assez d’argent? Ce sont ces petits aspects qui nous rapprochent.
Je crois fermement en l’importance de garder les mêmes chefs et groupes pendant longtemps. J’étais avec Gordon Ramsay pendant sept années et demie, puis Daniel Boulud pendant quatre ans. C’est important de trouver des gens qui se soucient vraiment de vous, de votre évolution comme chef et comme humain. Nous essayons de faire ça, et d’offrir un mentorat qui va au-delà de la nourriture.
Les gens doivent comprendre la logistique financière des restaurants, et ce n’est pas beaucoup enseigné. Les autres peuvent être très secrets à ce sujet, alors que nous montrons nos chiffres à tout le monde. Les chefs de cuisine doivent connaître les revenus et les coûts pour apprendre à devenir de bons gérants. Ainsi, s’ils partent un jour pour ouvrir leur propre restaurant, ils connaîtront du succès, car ils auront ajouté des cordes à leur arc.
C’est connu, tenir un restaurant est difficile. Une petite erreur quant à l’emplacement ou au concept peut coûter cher. Les marges de profit sont faibles, peu importe le secteur, de la haute gastronomie aux restaurants décontractés. Il faut être efficace et faire confiance à son équipe. Ce qui me stresse le plus est de perdre des employés et de devoir en trouver de nouveaux. Il faut une équipe formidable pour avoir un restaurant formidable.
J’adore les restaurants et l’industrie des services alimentaires, alors quand on me pose ce genre de questions, je peux parler des heures. Mais je suis heureux de faire ce que je fais chaque matin. J’ai connu des échecs, j’ai déjà fermé deux de mes restaurants, mais cela ne m’a pas affecté. Je crois que j’ai appris de ces expériences. Il faut savoir où canaliser ses émotions et ses énergies. Auparavant, je devenais colérique ou trop passionné à propos d’éléments qui n’étaient pas si importants pour le restaurant et ses clients. Devenir plus mature au fil du temps m’a permis de me libérer de certaines choses qui me stressaient. C’est un secteur d’activité terrible si vous ne l’adorez pas.
Comment menez-vous votre barque cette année avec la pandémie, comparativement aux années précédentes?
Premièrement, je suis content d’être au Canada. La Saskatchewan prend les choses très au sérieux, et nous nous respectons beaucoup les uns les autres. Les gens portent des masques partout où ils vont, le confinement a été assez efficace, et nos chiffres sont restés assez raisonnables. Tout le monde ici participe, et nous en sommes fiers.
Nous avons offert un service de commandes à emporter tout au long de la fermeture. Les gens nous ont soutenus beaucoup. Ils faisaient bien des efforts pour nous. Ils étaient compatissants envers ceux qui ne pouvaient pas faire d’argent ou travailler pendant le confinement. Nous ne nous attendions pas à recevoir des visiteurs de Toronto, de Vancouver ou de Calgary pour les affaires ou le tourisme. Les gens d’ici ont toujours été notre priorité, et maintenant plus que jamais.
Nous étions très préoccupés par la situation des cultivateurs, nous travaillons avec deux ou trois qui nous procurent la majorité de nos produits chaque année. Ils cultivent tout ce dont nous avons besoin, donc ne pas savoir si nous pourrons rouvrir et acheter ces ingrédients est aussi stressant que de fermer nos entreprises. Ils font de notre restaurant un endroit extraordinaire avec leurs légumes et leurs viandes produits localement.
Lorsque nous avons été autorisés à rouvrir, nous avons changé le menu tous les deux ou trois jours pour tenir compte des différents ingrédients qui arrivaient. Nous avons pu acheter tout ce que nous avions promis.
La capacité permise de 50 % pose problème, car les coûts ne changent pas. Nous avons bénéficié d’un bon soutien du gouvernement pour les salaires, et nos propriétaires nous ont permis de recevoir des subventions pour le loyer également. L’objectif général pour l’instant n’est pas de faire de l’argent, mais plutôt d’éviter d’en perdre. Il faut se stabiliser et continuer jusqu’à la fin de cette pandémie.
Nous sommes très fiers d’avoir rembauché la majorité de notre équipe, et nous allons de mieux en mieux. Si on n’en sort pas meilleur, une sérieuse réflexion s’impose. C’était une occasion de se réinventer, de regarder son entreprise et de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Peut-on être plus rentable? Que pouvons-nous éliminer? Que pouvons-nous améliorer? Je suis chanceux d’avoir cette clarté et des partenaires commerciaux exceptionnels. Ceci dit, je ne voudrais pas vivre 2020 à nouveau.
Quelle est la suite pour Grassroots Restaurant Group? Comment souhaitez-vous que votre entreprise évolue au fil des années à venir?
Mon partenaire et moi étions sur le point de commencer des rénovations pour créer un centre d’événements à Regina, dans le même bâtiment qu’Avenue. C’est un projet qui demeure dans les plans, mais nous sommes heureux qu’il soit en suspens, car les centres d’événements sont faits pour rassembler de grandes foules.
Nous n’avons pas d’idées grandioses pour ouvrir de nouveaux restaurants pour l’instant. Je tiens juste à maintenir la qualité et à m’assurer que nos clients reviennent. C’est ce qui est remarquable dans le fait d’avoir des chefs de cuisine et des gérants dans chaque restaurant : leur passion va nous pousser à évoluer encore et encore. Je ne peux pas tout changer, et mon partenaire d’affaires non plus, alors on compte sur notre équipe pour continuer à progresser.