Chef Jinhee Lee
Nous nous sommes arrêtés au JinBar pour en savoir plus sur le parcours qui l'a conduit à créer le restaurant le plus populaire des Calgariens à la recherche de plats coréens réconfortants.
Lire la biographieLorsque la pandémie a frappé la côte Ouest, le diplômé de l’Université de la Colombie-Britannique et de l’Institut culinaire française Angus An a dû fermer six restaurants. Fat Mao Noodles, Freebird, Longtail Kitchen, Maenam, Popina Canteen et Sen Pad Thai.
Vingt-quatre heures plus tard, les locaux du chef An devenaient des établissements de repas pour emporter, ce qui lui a permis de traverser les premiers jours de la COVID-19.
Nous avons parlé au chef An de son parcours et de ce qu’il a ressenti en ne sachant pas à quoi s’attendre.
Vous possédez et exploitez six restaurants à Vancouver. Comment avez-vous choisi d’adapter chacune de vos activités lorsque la pandémie a frappé?
Avant que le mandat provincial ne l’exige, nous avons choisi de fermer tous nos restaurants le même jour. Ces fermetures auraient eu lieu de toute façon et nous voulions faire la bonne chose. Nous les avons donc fermés le lundi, puis nous avons rouvert la cuisine le mardi pour préparer des repas à emporter chez Maenam, notre restaurant phare. Tous nos autres restaurants sont demeurés fermés, mais le service pour emporter était un moyen pour nous d’écouler nos stocks.
Au début, quand j’ai pensé à la fermeture, je pensais qu’il y aurait deux à quatre semaines de quarantaine, mais cela a pris beaucoup plus de temps.
Dès le premier jour, les plats à emporter étaient assez décents. Ce n’était pas aussi lucratif que nos repas en salle à manger, mais nous avons eu plus de commandes que ce à quoi nous nous attendions. Auparavant, les commandes pour emporter représentaient de cinq à dix pour cent de nos activités, mais je crois que le nombre a doublé à la réouverture, et il ne cesse d’augmenter depuis.
En modifiant le modèle d’entreprise de votre établissement, de quelle façon votre rôle de chef propriétaire/exploitant a-t-il changé?
Mon rôle a changé, passant de la planification de nouveaux restaurants et d’activités promotionnelles au redémarrage d’entreprises bloquées, ce qui demande beaucoup plus de travail et d’énergie. Il est de plus en plus difficile de maintenir les restaurants ouverts et de les faire fonctionner tout en s’occupant des salaires, de la planification des lieux et d’autres tâches administratives.
Mes journées sont plus remplies et moins productives. J’ai plus de feux à éteindre et je travaille plus dur que jamais.
Maintenant que Vancouver est en phase 3, décrivez comment vous avez préparé la réouverture de chacun de vos restaurants.
C’était vraiment bien de pouvoir garder Maenam ouvert pour les plats à emporter, mais nous avons gardé tout le reste fermé pendant au moins deux mois. Après Maenam, nous avons rouvert Fat Mao Noodles, puis Sen Pad Thai, Popina et Longtail. Dans chaque cas, il s’agissait de parler à notre personnel de leur confort et de passer du temps à élaborer un plan de sécurité COVID-19 pour chaque restaurant. Nous avons suivi les lignes directrices émises par le gouvernement de la C.-B. et la santé culturelle de Vancouver. Nous avons également augmenté l’utilisation de désinfectant et d’appareils HEPA. Nous avons créé des formulaires personnels que nos associés ont signés, déclarant qu’ils ne se mettaient pas en danger en allant à des fêtes à domicile ou à d’autres activités potentiellement dangereuses. S’ils ne se sentent pas bien, il n’y a aucune tolérance, ils ne peuvent pas venir travailler.
En ce qui concerne les places assises, j’ai dû modifier le plan des restaurants pour maintenir une distance physique de deux mètres. La Colombie-Britannique est passée d’une capacité de 50 % à une capacité illimitée si l’espace est suffisant. Pour les petits restaurants comme les nôtres, le fait d’avoir des tables à deux mètres de distance équivaut en gros à 50 % pour nous.
Quels sont les plus grands défis que vous avez rencontrés depuis la réouverture? Et quelle a été votre plus grande réalisation?
Habituellement, je peux prévoir deux mois à l’avance en fonction des résultats passés, mais nous n’avons aucune idée de ce qu’un mois de cette année va apporter. C’est un enjeu important. Il est difficile de ne pas avoir la moindre idée de ce à quoi l’avenir va ressembler.
L’augmentation du coût des denrées alimentaires constitue également un défi majeur. En tant que restaurateur thaïlandais, nous expédions une grande partie de nos produits par avion depuis la Thaïlande et il y a moins de vols aller-retour maintenant. Nous ne recevons plus les produits frais deux fois par semaine comme avant, et ce que nous recevons est cinq à dix fois plus cher en raison d’un accès limité. C’est un cauchemar que nous devons gérer.
D’un côté plus positif, la raison pour laquelle nous faisons tout cela est de rassembler les gens et de leur apporter du bonheur. Le premier jour de la réouverture, nous avons été accueillis par nos habitués de longue date. Les résidents reviennent et de plus en plus d’habitués reviennent aussi. Ils ont tous le sourire au visage et semblent heureux de voir que nous sommes toujours là et que nous nous portons bien. C’est la plus grande récompense.
Avez-vous modifié ou adapté les menus pour compenser les coûts de fonctionnement? Si oui, de quelle façon?
Pendant le confinement, mon chef a créé un jardin sur le toit et, pour le plaisir, nous avons commencé à cultiver nos propres herbes. Cela nous a permis de compenser certains des changements, mais nous ne pouvons pas continuer à dépendre de cela alors que nous sommes en plein essor.
La clé a été notre passage à un menu plus petit afin qu’une plus petite équipe puisse s’exécuter correctement. Nous avons également dû réduire nos importations. Heureusement pour nous, c’est l’été, donc il y a eu beaucoup de beaux produits locaux.
C’est plutôt pour les mangues grillées et la citronnelle que nous ne pouvons pas faire d’économies et que nous devons payer plus cher. Nous ne proposons pas de plats qui utilisent trop ces produits, mais nous les utilisons quand ils sont demandés.
Quelles mesures prenez-vous pour protéger vos restaurants contre des circonstances plus imprévues ou des situations semblables?
À mi-chemin du confinement, nous avons commencé à préparer des aliments emballés et prêts à manger comme le curry. Nous nous sommes associés à un fournisseur local de livraison de produits alimentaires pour les vendre, et tout se passait bien avant le redémarrage.
Je pense à offrir davantage de sauces à emporter. Les gens cuisinent beaucoup à la maison; il peut être agréable de ne pas avoir à préparer la sauce et le fait d’avoir ces ensembles ou emballages prêts à manger peut aider les gens à en profiter à la maison.
Quel est le conseil que vous donneriez à un restaurateur qui se prépare à rouvrir son restaurant?
Prenez votre temps. Lorsque nous avons su que nous pouvions commencer à rouvrir nos portes, nous n’avons pas sauté sur l’occasion. Nous avons attendu environ une semaine, pour voir ce que faisaient les autres restaurants et comment ils se débrouillaient avec les nouveaux mandats. Lorsque nous avons finalement repris le flambeau, nous n’avons pas retrouvé immédiatement nos heures d’ouverture complètes ni tout notre personnel.
Donc, mon conseil serait de revenir doucement. Allez-y lentement et procédez étape par étape, peut-être cinq jours par semaine au lieu de sept. Assurez-vous aussi de pouvoir gérer les nouvelles restrictions.
Si vous voulez ouvrir cinq jours pour les dîners et les soupers, essayez d’abord de ne faire que les soupers. Si tout se passe bien, ajoutez les dîners la semaine suivante. Si cela se passe également bien, réengagez votre équipe et ouvrez vos portes sept jours.
Compte tenu de la nouvelle réalité du secteur de la restauration, comment aimeriez-vous le voir évoluer et surmonter la situation actuelle?
Éventuellement, cette chose doit disparaître, mais nous ne savons pas quelle part de l’industrie de la restauration subsistera par la suite. Nous ne sommes pas près de voir la fin, nous sommes à peine au milieu de tout cela.
Je pense qu’on peut dire sans se tromper que les gens mangeront toujours au restaurant parce que la nourriture rapproche les gens. Il y aura toujours de la place pour les restaurants, mais ce sera une reconstruction lente et douloureuse pour notre industrie.
J’aimerais voir plus de gens soutenir leurs restaurants et entreprises préférés d’une manière qui ne met pas les autres en danger. Nous devons tous prendre la responsabilité d’être sûrs, patients, attentifs à ce virus, et nous devons comprendre et sympathiser avec les propriétaires de restaurants le vivent également.